Lutte contre EBOLA: Une visioconférence avec le Président de la Banque Mondiale Jim Yong KIM réunie les parlementaires des pays touchés.

28 février 2015

Lutte contre EBOLA: Une visioconférence avec le Président de la Banque Mondiale Jim Yong KIM réunie les parlementaires des pays touchés.

  » Il ne faut pas oublier que l’épidémie a commencé par un cas »

Visioconférence avec le Président du Groupe de la Banque Mondiale, Jim YONG KIM
Visioconférence avec le Président du Groupe de la Banque Mondiale, Jim YONG KIM

Depuis la déclaration de l’Epidémie de fièvre hémorragique à Virus Ebola comme menace pour la santé et l’économie mondiale, les Institutions se sont mobilisées pour réduire les risques de contamination en finançant la riposte par :l’envoi de médecins,  des dons de matériels médicaux, de vivres, de matériels roulants et de communication, l’annulation de la dette des pays touchés. Plusieurs sommets et Conférences de haut niveau ont été également organisés en Afrique et ailleurs: Il s’agit notamment du Sommet EBOLA  aux Etats-Unis à l’issue du Sommet Afrique-Amérique qui a réuni les Chefs d’Etat africains sur invitation du Président Barack OBAMA, des Assemblées Annuelles du Fonds Monétaire International et du Groupe de la Banque Mondiale, et bientôt du Sommet de Bruxelles prévu début Mars.

Cette épidémie qui  continue à faire des victimes a connu une réponse lente de la part de la communauté internationale. Ce que le Président du Groupe de la Banque Mondiale Jim Yong KIM avait déploré lors des Assemblées tenues en octobre 2014 en soulignant qu »il faut une synergie d’actions pour freiner cette maladie. Nous devons agir maintenant car il serait trop tard demain et les effets collatéraux de la maladie ne feront que s’envenimer. Les moyens à déterminer seront de plus en plus lourds à supporter. Si on n’y prend pas garde, la crise dans ces trois pays aura une incidence dans toute la sous-région, de la sous-région vers l’Afrique, l’Europe et un peu partout dans le monde ».

 Spécialiste en Épidémiologie, Dr KIM  demande l’implication de toutes les composantes pour  lutter contre la peur, réduire l’impact financier et mettre fin à l’avancée du virus. D’où l’initiative d’organiser  cette visioconférence  conjointement par le Réseau parlementaire sur la Banque Mondiale et le FMI.

Simultanément diffusée le mercredi 25 février 2015 à Washington DC, Londres, Conakry, Freetown, Dakar, Monrovia et Bamako, cette visioconférence a mobilisé les parlementaires, les Représentants de la Banque Mondiale des pays touchés, ainsi que les partenaires impliqués dans la riposte notamment la France et l’Angleterre.

L’objectif  était de donner l’opportunité aux parlementaires des pays touchés par le virus Ebola, à deux principaux pays donateurs d’échanger sur la réponse apportée au fléau EBOLA avec le Président du Groupe de la Banque Mondiale Jim Yong KIM et de hauts responsables de l’Institution entre autres: le Vice-président pour l’Afrique Makhtar DIOP, et le Directeur pour la Santé Tim EVANS.

Animée par l’Honorable Jeremy LEFROY, Président du Réseau Parlementaire sur la Banque Mondiale et le FMI (PN) et Député du Royaume-Uni, cette conférence virtuelle a également été mise à profit pour discuter du soutien financier (près d’un milliard de dollars US) que la Banque Mondiale a mis à la disposition des pays touchés par l’épidémie de fièvre hémorragique à virus Ebola qui a fait à ce jour  plus de 8000 décès dont 2057 en Guinée selon le dernier bilan de l’OMS en date du 15 Février 2015.

Des échanges ont porté sur les impacts sociaux et économiques de l’épidémie, des efforts nécessaires pour aider les pays touchés à atteindre zéro cas, les perspectives de reconstruction y compris l’investissement dans les systèmes de santé publique performants.

Dans son discours liminaire, l’Honorable Jeremy a remercié la Banque Mondiale d’avoir initié cette conférence avant de souligner qu’il est important de réfléchir sur ce qui s’est passé et prendre des dispositions pour l’avenir:   » les  voix des parlementaires doivent se faire entendre car ce sont eux qui représentent les électeurs, les communautés qui sont touchées. »

 Poursuivant, le Député de Stanford a suggéré que des mesures pratiques doivent être prises à l’issue de cette conférence tant par les Gouvernements que la Communauté  Internationale. C’est pourquoi selon lui, nous devons répondre à différentes questions:

  1.  Qu’est ce qui doit être fait pour assurer une meilleure riposte sur les plans national et international?
  2. Comment réduire l’inégalité au niveau de la couverture sanitaire et continuer à lutter contre les maladies telles que le VIH/SIDA, le Paludisme, les maladies tropicales dont la riposte a connu des efforts remarquables depuis le début du millénaire?
  3. Ebola a été traitée comme une urgence médicale avec une riposte médicale, en oubliant le facteur psychologique, la destruction des communautés. Il s’agit aussi de savoir quoi faire pour élaborer des documents-conseils et enfin
  4. le financement de l’urgence dans les pays touchés.
Depuis Washington DC, le Président du groupe de la Banque Mondiale JIM YONG KIM  participe à la visioconférence
Depuis Washington DC, le Président du groupe de la Banque Mondiale JIM YONG KIM participe à la visioconférence

 Prenant la parole, le Président du Groupe de la Banque Mondiale a souligné que le rôle des parlementaires est essentiel pour évaluer les progrès réalisés dans la riposte. Les efforts parlementaires aideront à atteindre l’objectif « Zéro Cas d’Ebola » que nous nous sommes fixés et aider les pays à avoir un boom économique:   »Il est important de le souligner que cette semaine, il y’a eu des nouveaux cas en Guinée (144) , au Libéria (65) et en Sierra-Léone (76).  Il ne faut pas oublier que l’épidémie a commencé par un cas et bien qu’il y ait eu des changements comportementaux, il ne faut pas que nous nous éloignions de l’objectif zéro.

 »Nous  présentons nos condoléances aux parlementaires des pays touchés et nous demandons pardon aux populations de nous excuser car nous n’avons pas fait face le plus tôt que possible à cette crise épidémiologique. Mais nous avons rapidement agit dès que nous nous sommes rendus compte de l’ampleur de la crise. D’ailleurs la Banque Mondiale a été la première a proposé des fonds nécessaires à la riposte d’Ebola et d’autres pays nous ont suivi dans notre sillage. Près d’un milliard de dollars US au total pour la Guinée, le Libéra et la Sierra-Léone, 580 millions pour les fonds d’intervention d’urgence (sous forme de dons) pour endiguer la propagation du virus, les appuis sanitaires, les accessoires et les fournitures et autres services de base, 240 millions pour les interventions post-crise..

…Nous sommes conscients que cette crise est dévastatrice pour le système économique et c’est pourquoi nous comptons financer un peu plus de 6 milliards de dollars  seront accordés en terme de croissance en post 2016 ».

 Jim Yong KIM a évalué l’impact du virus entre 500 à 600 milliards de US.  »Il faut donc réfléchir au plan de redressement » insiste t-il.

Pour le N°1 de la Banque Mondiale, Chaque pays dans le monde doit disposer d’un système de santé adapté à ce type de crise; même dans les zones les plus reculées, en terme d’infrastructures, d’équipements pour prévenir les futures épidémies. Le cas du Mali et du Sénégal ont permis de démontrer comment un système efficace peut contribuer à freiner la propagation du virus.

Dans cette crise épidémiologique, les femmes ont été les plus touchées, c’est pourquoi, selon Dr KIM, il faut mettre à leurs dispositions des outils essentiels pour des soins efficaces. Cette démarche doit permettre de mettre en place une protection sociale plus efficace.

Avant de laisser place aux interventions des Députés,  Dr Jim Yong KIM a remercié le leadership du Réseau Parlementaire et a souhaité que les échanges se poursuivent pendant les Assemblées du Printemps annoncées pour le mois d’Avril.

Les parlementaires guinéens  échangent avec le Représentant-Résident de la Banque Mondiale
Les parlementaires guinéens échangent avec le Représentant-Résident de la Banque Mondiale

Du côté guinéen,  il est revenu au Président de la Commission Santé de l’Assemblée Nationale, M. Aboubacar SYLLA de faire l’état des lieux. Pour le Député, l’Epidémie EBOLA  a complètement pris au dépourvu la Guinée dont le système de Santé déjà fortement dégradé, n’était pas du tout préparé à relever le défi de l’éradication rapide de ce redoutable fléau qui tend à être une crise sanitaire mondiale. Ce qui a eu pour conséquence, l’expansion de la maladie de façon rapide alors que les infrastructures sanitaires étaient insuffisantes et  défaillantes, un corps médical avec un effectif insuffisant et sans expérience pour formuler et appliquer une stratégie efficace de riposte. L’autre facteur de blocage était que les mentalités et les traditions locales n’étaient pas préparées à s’adapter aux mesures de  prévention et de riposte. A côté de cela, l’aide en matériels, en moyens financiers et en ressources humaines de la part de la communauté internationale a connu du retard. Ce qui a entrainé une amplification inattendue de l’épidémie qui s’est propagée dans les pays limitrophes dont la Sierra-Léone et le Libéria.

L’autre facteur souligné par l’Honorable SYLLA, est l’implication tardive de l’Assemblée Nationale par les autorités sanitaires dans la stratégie de riposte. Cela aurait permis une communication rapprochée et plus crédible aux yeux des populations et contribué à réduire le phénomène de réticence qui a considérablement affecté l’efficacité des mesures de préventions appliquées.

Pour Aboubacar Sylla, les députés en leur qualité de représentants du peuple constituent un relais efficace permettant de porter au niveau des décideurs publics, les préoccupations des populations ainsi que la demande sociale qui s’exprime de façon pressante par:

  • Le développement d’une offre de soins accessibles et équitables;
  • La résorption du déficit et l’amélioration de la productivité du personnel de soins;
  • Le renforcement du système d’information et de veille sanitaire pour identifier toutes les maladies à potentiel épidémique y compris l’EBOLA;
  • La remise sur pied du Système  de soins par la reconstruction des infrastructures sanitaires;
  • La réduction du poids des dépenses de santé sur les ménages à travers le développement de mécanismes d’assurance maladie et de développement d’une politique de commercialisation de produits génériques.

 Les députés guinéens, ont réussi à mettre de côté leur divergence politique pour faire face à la gravité de l’épidémie. C’est dans cette perspective que dès la rentrée parlementaire prochaine,  l’Assemblée Nationale va s’attaquer à élaborer et approuver des propositions de lois destinées à corriger les anomalies constatées et les insuffisances relevées dans la gestion de l’épidémie du point de vue institutionnel qu’opérationnel.

Pour terminer sa communication, le Président de la commission santé a lancé un appel à la communauté internationale pour qu’un véritable Plan Marshall se mette en place au profit des principaux pays touchés  afin de relever leurs économies profondément affectées et de donner des chances de succès à la lutte contre la pauvreté.

Emboitant le pas de l’Honorable SYLLA,  Dr Ousmane KABA, Président de la Commission des Affaires Economiques, du Plan et de la Coopération de l’Assemblée Nationale guinéenne, a depuis le siège de la Banque Mondiale à Paris, participé à la visioconférence.

Dans son speech, l’Honorable KABA a apprécié le rôle des Institutions de Bretton Woods pendant cette crise. Une assistance qui a contribué d’une part à briser l’isolation politique et diplomatique des pays touchés par EBOLA et d’autre part de donner une aide financière rapide et significative.

En 2014, la Banque Mondiale  a accéléré ses procédures et a financé directement la Guinée à hauteur de 103 millions de dollars US dont des décaissements de 45 millions dans le but de stopper la progression d’EBOLA et d’éviter l’effondrement de notre système de santé mais aussi de maintenir la stabilité macroéconomique. A cette aide s’ajoute celle du FMI, de la BAD, de l’Union Européenne, des pays comme la France, les Etats-Unis, la Grande Bretagne, la Chine, le Maroc et la Russie.

Dr Ousmane KABA a axé son intervention sur trois points: les leçons à tirer de la maladie, les défis sanitaires et économiques.

 

  1. Les leçons apprises de l’Expérience EBOLA

Avec 3108 cas confirmés dont 2057 décès à la date du 15 février 2015, la Guinée a profondément été touchée sur les plans économiques, sociologiques, religieux et anthropologiques comme les rapports du vivant avec les morts. La propagation de la maladie a été directement liée à la vie sociale profondément communautaire et aux rites funéraires traditionnels. Ces comportements qui ont généré des réticences populaires non prévues.  Pour le Député, il était important d’accorder au volet de l’information et sensibilisation des populations des zones aussi bien urbaines que rurales, action aussi importante que la lutte sanitaire pour éradiquer l’épidémie EBOLA, même s’il faut utiliser la force publique pour pallier à certaines résistances.

L’importance du temps de réaction aussi bien des autorités sanitaires que du Gouvernement et de la Société Civile, la faiblesse de nos capacités sanitaires sont  aussi une leçon apprise de cette épidémie, qui été une première  jamais détectée en Guinée.

L’efficacité de la solidarité internationale en termes politique et diplomatique, sanitaire et financier a été toute aussi importante car elle a permis de briser l’embargo sur les pays touchés, liés par la mobilité des personnes et des capitaux.  »La maladie n’a besoin ni de passeport ni de visa pour se déplacer ».

 2. Renforcer les systèmes de santé plus solide

Il s’agit de construire des hôpitaux et des centres de santé ainsi que des équipements adéquats; la mise en place des centres de recherches et des laboratoires épidémiologiques pour toutes les grandes endémies, la formation non seulement du personnel existant mais également la formation initiale des médecins des médecins et autres personnels soignant, moyens les plus surs de garantir la qualité des services de santé pour le long terme.

3. Relancer l’économie post-EBOLA

Pour le FMI, l’épidémie a couté à la Guinée en 2014 plus de 2 points de croissance du PIB sur une prévision initiale de 4%

La crise sanitaire qui sévit en Guinée et dans la sous-région a sérieusement impacté les transports, le tourisme et ralentit tous les projets presqu’existants et le reports des nouveaux projets notamment la mise en œuvre du projet Simandou, l’un des plus grands projets miniers au monde avec plus de 20 milliards de dollars d’enveloppe prévue, des projets énergétiques, agricoles ou miniers ont été également délayés.

Avant de conclure son allocution, Dr  Ousmane KABA a lancé un appel à la Banque Mondiale, appel qu’il a axé sur six leviers qui contribueront à soutenir l’activité économique et la croissance. Il s’agit du:

  • maintien de l’aide d’urgence sanitaire afin de prévenir tout rebondissement;
  • l’annulation de la dette des pays lourdement handicapés par EBOLA;
  • l’accroissement de l’aide financière au budget et à la balance des paiements;
  • un projet de reconstruction et de renforcement du système sanitaire;
  • la poursuite des projets des infrastructures de base et des secteurs porteurs;
  • un appui humanitaire aux victimes d’EBOLA.

A l’image de leurs confrères guinéens, les députés libériens ont également fait des communications portant sur le secteur de la santé, le renforcement des capacités humaines pour détecter la maladie.  »Nous avons eu suffisamment d’expériences pour savoir ce que nous devons faire ».

 Pour les députés Sierra-léonais, avant l’épidémie, la croissance de leur pays se chiffrait à 11, 3% :  »Nous devons continuer à lutter jusqu’à ce que le virus EBOLA diminue avec l’appui des Institutions pour relancer l’économie .Nous combattons la faim et la pauvreté dans nos sociétés. »

Les  députés léonais ont aussi déclaré que ce sont les femmes qui ont souffert avec cette crise sanitaire en raison de leur rôle d’aidantes et de soignantes.  »Nous recherchons un appui pour les communautés et pour l’autonomisation du système financier ».

Ils ont également souligné que le Tourisme est au point mort alors qu’il permettait de développer les communautés.

Le Mali et le Sénégal ont quant à eux partager leur expérience de  riposte avec leurs frères de Guinée, de Libéria et de la Sierra-Léone lourdement affectés par cette épidémie.

Pour réussir sa sensibilisation, le Sénégal a déboursé 150 millions de FCFA sur son budget. 30 millions de dollars US ont été donnés par les partenaires. Ce qui a contribué a avoir une approche multisectorielle, une communication grand public pour sensibiliser au lavage des mains, la mise à disposition des kits de lavage de mains, des thermomètres à infrarouge au niveau des différentes frontières.

Résumant les différentes allocutions, le Président de la Banque Mondiale, Jim Yong KIM a parlé de la nécessité de rendre accessible l’information publique, et amener les parlementaires à faire une action sociale, les gouvernements à renforcer leurs systèmes de santé, les donateurs à faire l’appui nécessaire pour aider les pays.

 »Mondialement parlant la crise a été maitrisée. Mais il faut davantage renforcer les systèmes de santé dans les communautés pour réussir la riposte. il faut qu’on soit préparer à combattre la prochaine crise sanitaire. Car celle-ci pourrait être bien plus grave. »

 Dans la même lancée, le Vice-président pour l’Afrique Makhtar DIOP du Groupe de la Banque Mondiale a quant à lui souligné que l’épidemie de fièvre hémorragique à virus EBOLA a démontré la faiblesse des systèmes de santé. ll faut donc trouver diverses sources de financement pour renverser cette tendance. Sa lutte ne doit pas non plus  nous conduire à nous détourner des maladies comme le Paludisme.  »Il faut savoir qu’est ce qu’il faut pour un système de santé solide, tant en infrastructures,  en logistiques qu’en ressource humaines ».

Makhtar DIOP, Vice-Président pour l'Afrique de la Banque Mondiale depuis le siège à Washington DC
Makhtar DIOP, Vice-Président pour l’Afrique de la Banque Mondiale depuis le siège à Washington DC

Le Sénégalais Makhtar DIOP a déclaré  »EBOLA en Afrique, c’est EBOLA dans le monde. Il ne sert à rien donc de stigmatiser les pays touchés ». Comme pour faire un appel à la communauté de ne pas  »Isoler les pays, mais isoler Ebola ».

 Dans le rapport final sanctionnant la fin de la conférence virtuelle, l’Honorable Jeremy Lafroy a invité les parlementaires à s’engager activement et à s’impliquer dans les efforts d’éradication de l’épidémie d’Ebola et au soutien à la reconstruction.

Pour rappel, le Réseau Parlementaire sur la Banque Mondiale et le FMI (FN) est une plate-forme globale où des Députés du monde entier prônent une plus grande responsabilisation et transparence dans les pratiques de gouvernance et de développement.

Chérif Fatoumata

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