Ouverture officielle de la COP 12 de l’UNCCD à ANKARA: Retour sur une journée riche d’engagements pour la terre et les sols.
Ankara, la capitale de la Turquie abritera durant deux semaines, la douzième session de la conférence des parties (COP 12) de la convention des Nations Unies pour la lutte contre la désertification (UNCCD).
L’ouverture officielle de la session s’est tenue ce lundi 12 Octobre 2015 au ATO CONGRESSUM en présence des délégués des 195 Etats membres, des représentants d’Institutions Internationales , des organisations de la société civile, des médias, des parlementaires, des hommes d’affaires ainsi que ceux du secteur privé.
Cette conférence se tient dans un contexte où le monde se trouve confronté à plusieurs enjeux notamment celui du changement climatique. Il s’agira entre autres objectifs de la COP, de discuter des solutions aux problèmes liés à la désertification, la dégradation des terres et la sécheresse (DDTS) afin de réaliser les Objectifs du développement durable (ODD) à l’horizon 2030 en son point 15 : » lutter contre la désertification, restaurer les terres dégradées et des sols, y compris les terres touchées par la désertification, la sécheresse et les inondations, et nous nous efforçons de parvenir à un monde dégradation des terres neutre « .
A l’entame des travaux, il est revenu au Président de la COP 11, S.E. M. Pohamba Shifeta, Ministre de l’environnement de la Namibie de présenter des condoléances au peuple et au gouvernement turque suite à l’attentat perpétré contre d’innocentes victimes le samedi 10 octobre : ‘’Malgré cette triste réalité, les autorités turques ont été d’une hospitalité indescriptible’’.
Poursuivant son allocution le Président sortant a tenu à féliciter le secrétariat de l’UNCCD pour les efforts déployés pour la réussite de cette conférence avant de déclarer que la lutte contre la désertification est une condition essentielle à la lutte contre la famine et la pauvreté. ‘’Je suis convaincue que la situation commence à changer. Avec les ODDs l’espoir est permis pour lutter contre la désertification, la dégradation des terres et de la sécheresse et pour promouvoir la remise en état des terres dégradées’’.
C’est sur ces mots qu’il a procédé à l’élection du nouveau Président de la COP 12 en la personne de S.E. Prof. Dr. Veysel Eroglu, ministre des Eaux et Forêts de la Turquie qui, dans son allocution a mentionné qu’ ‘’un monde sans les arbres est un monde vide car les rivières parlent aux gens alors que le langage du désert est silencieux’’
Shifeta, Minister of #Namibia handing over the COP presidency to Eroğlu, Minister, #Turkey, as #AnkaraCOP12 President pic.twitter.com/LoMNEYzmk9
— Çölleşmeyle Mücadele (@cemgovtr) October 13, 2015
Pour le Président entrant, si le problème de la désertification n’est pas résolu, plus de 9 milliards d’individus seront touchés par le phénomène et n’auront pas accès à de l’eau potable. Elle engendrera une migration forcée des populations car près de 500 milles individus se trouveront déplacés et plus d’ 1 milliards de personnes souffriront de malnutrition.
C’est ainsi qu’il a déclaré que les problèmes d’accès à l’eau et la sécurité alimentaire s’expliquent par la perdre des sols. ‘’Vivons et laissons le monde vivre les sols’’
Poursuivant, le Ministre turque des eaux et forêts a mentionné que l’urbanisation mal planifiée et la mauvaise gestion des sols ont pour conséquence, une perte annuelle de près de 500 millions de dollars, la perte de la biodiversité, et les émissions carbones. ‘’Pour assurer une eau potable aux futures générations, la sécurité alimentaire, il faut changer les comportements et s’assurer de protéger des terres fertiles, il faut tenter de remettre en état les terres dégradées car notre vie, notre existence dépendent des sols. Il faudrait également s’assurer de nouvelles approches innovantes vis-à-vis de la protection de l’environnement’’.
Le ministre a toutefois noté que la lutte contre la désertification et la protection de l’environnement vise à déployer des efforts au niveau national et mondial. C’est dans ce cadre que la Turquie a planté 3 milliards de jeunes arbres et compte mettre en œuvre de nouvelles politiques en augmentant de 30 % la couverture forestière d’ici à l’horizon 2023, centenaire de la République, mais aussi en coopérant avec les pays voisins.
Prof. Dr Eroğlu highlighted the “#Road to #Ankara” initiative to engage the business communit.#AnkaraCOP12 pic.twitter.com/TJdKXY8uA1
— Çölleşmeyle Mücadele (@cemgovtr) October 13, 2015
Il a également exprimé la disponibilité du Gouvernement turque à appuyer d’autres pays afin que les objectifs communs soient atteints car, soutient-il, la Turquie a une belle expérience dans le cadre de la lutte contre la désertification. ’’Les pma (pays moins avancés) sont les plus touchés par la désertification. Fixons nous de nouveaux objectifs et assurons nous de les mettre en œuvre’’.
Pour conclure, Dr. Veysel Eroglu a rappelé une citation d’un poète turque : ‘’j’ai beaucoup d’amis, mais je sais que le meilleur d’entre eux, est le sol. J’ai été épris par beaucoup de femmes, mais seule la terre m’apporte ce que je veux’’.
Pour matérialiser ces propos, le Président de COP 12 a informé les participants qu’un arbre a été planté en leur honneur sur les terres de la Turquie, pays hôte.
Le maire de la ville d’Ankara Melih GÖKÇEK a quant à lui condamné fermement le terrorisme qu’il considère comme une atteinte à la liberté et la démocratie.
Flashback sur la session plénière de la #Cop12 à #Ankara ce lundi 12 Octobre @AnkaraCOP12 pic.twitter.com/mW6s6uk9G1
— Chérif Fatoumata (@Fatiiche) October 12, 2015
Pour la Secrétaire Exécutive de l’UNCCD, Monique BARBUT qui est à sa première COP depuis sa nomination en 2013, la neutralité en terme de dégradation des terres aura une implication sur la façon dont nous opérons en particulier comment établir des rapports et évaluer des progrès car notre objectif est également d’évaluer les processus pouvant réduire la fréquence des rapports nationaux à une fois toutes les quatre années, pour qu’un changement significatif des tendances de la dégradation des terres puissent être observé.
‘’Nous devons imaginer une coopération plus étroite entre le comité de la science et de la technologie et le comité chargé de la mise en œuvre de la convention. Nous devons avoir des réunions plus nombreuses et peut être plus informelles avec les annexes régionales afin qu’elles puissent jouer un rôle plus important sur le travail de fonds de la convention. Il faut aussi une autre interface science/politique différente de celle qui existe. Il s’agit également de savoir comment renforcer la collaboration avec l’ensemble des parties prenantes ‘’.
La Secrétaire Exécutive a également salué l’implication des acteurs de la société civile dont 80 ont été accréditées pour cette présente session, des syndicalistes des parlementaires des hommes et femmes d’affaires intéressées par les questions de gestion durable des terres. ‘’Nous devons être en mesure de mieux exploiter cette force et ces réseaux afin de les intégrer dans les organes de décision’’ a-t-elle recommandé.
Comme reformes au niveau du Secrétariat, Monique Barbut a soutenu que des efforts considérables ont été déployés sur le plan de la gestion et de l’administration pour adapter le secrétariat et le mécanisme mondial à cet objectif, en rationnalisant les unités du secrétariat, en introduisant des reformes administratives et en réduisant le budget de fonctionnement : ‘’J’espère que vous trouverez que le rendement s’en est amélioré et que nous avons su maitriser les coûts ces dernières années. Nous avons tout fait pour utiliser l’argent investi de manière efficace. Avec un peu de flexibilité, je suis pleinement convaincue que nous pouvons faire ce qui doit être fait avec une croissance nominale du budget de base lors du prochain exercice biennale’’.
Elle a toutefois recommandé de s’abstenir de tout engagement supplémentaire qui ne serait pas associé à un financement clair : ‘’Nous avons simplifié la proposition du budget pour que tout participant à la COP soit en mesure d’interpréter les principaux aspects du budget ainsi que son utilisation’’.
Pour conclure Monique Barbut a lancé un appel à toutes les parties prenantes à s’impliquer davantage pour que des actions soient menées pour améliorer la sécurité alimentaire, énergétique et hydrique de la planète, contribuer utilement aux débats sur la sécurité des personnes et la migration, jouer un rôle important pour parvenir à un développement durable pour tous: ‘’nous sommes en train de mettre en place un mouvement puissant visant à la mise en œuvre de cette convention. L’accélération de cette dernière ne peut que présenter des avantages à l’échelle mondiale’’. C’est sur ces mots qu’elle a souhaité à tous les participants, une conférence fructueuse avec des décisions audacieuses avant d’introduire le nouveau président du Mécanisme Mondial.
Prenant la parole, Nicolas HULOT a indiqué que nous assistons de plus en plus à la dégradation des terres ces dernières années compte tenu de la croissance de la population, ce qui entraine la multiplication d’évènements extrêmes climatiques ces dix dernières années.‘’Il faut donc de la solidarité pour combattre le phénomène. Et cette solidarité n’est pas une option mais une condition’’.
La science qui a été mandatée pour poser un diagnostic soutient que les températures moyennes sur la surface de la terre ont augmenté de 0,85 degrés centigrades entre la fin du 19ième siècle et le début du 21ième siècle.
C’est pourquoi il a tenu a rappelé que la COP 21 à Paris ne se suffira pas d’engagements aussi importants soient-ils, mais son succès dépendra des modalités pour tenir ces engagements.
Il a conclu son allocution en rappelant une assertion du Pape François lors du Sommet sur le Développement Durable en septembre à New York qui a déclaré que : ‘’trois conditions sont essentielles à la dignité humaine et à la justice sociale : Un travail, un toit et une terre’’.
Nicolat HULOT a alerté l’opinion sur les conséquences de la désertification, le changement climatique et la perte de la biodiversité qui contribuent à la disparition des espèces animales et végétales en soutenant que : « Si la nature laisse place aux inondations suite aux ouragans, alors travail, toit et terre disparaissent d’un seul coup et la capacité de résilience devient presqu’impossible ».
Après les allocutions officielles, les groupes thématiques régionaux ont également partagé leurs attentes de la COP 12 à Ankara.
Pour le délégué de l’Union Européenne, les politiques doivent prendre en compte les femmes et filles qui sont de plus en plus touchées par la désertification car l’autonomisation des femmes est une condition essentielle pour la mise en œuvre des Objectifs du Développement Durable (ODD).
Il a également soutenu que si des efforts ne sont pas déployés dans les cinquante années à venir ‘’50 millions de personnes devraient quitter leurs terres car elles seront dégradées’’. D’où la suggestion de faire de la convention, la cible principale pour la mise en œuvre des ODD en renforçant la synergie entre les différentes conventions, ce qui éviterait les chevauchements, améliorer le système de gestion des terres, aider les pays les plus touchés à améliorer leurs pratiques et diffuser de façon plus compréhensive, les résultats des scientifiques.
Pour le porte-parole du groupe Asie-pacifique, les fonds doivent être renforcés pour aboutir à l’engagement mondial d’ici 2030 tandis que celui du Groupe Amérique Latine et des Caraïbes recommande que le président entrant préserve la structure actuelle car la COP 12 intervient à un moment de tournant décisif qui touche notre existence. Il recommande que l’UNCCD appuie la mise en œuvre des projets de manière à aider les zones touchées à lutter contre à DLDD comme le recommande le point 15 des ODDs tout en obligeant les pays industrialisés à tenir leur engagement. Il s’agira également de renforcer les capacités des pays en développement en mettant en place une approche coordonnée et unifiée qui permettra de mettre en œuvre les objectifs fixés.
Le délégué du Groupe des Etats de l’Europe centrale et orientale, a quant à lui saluer les résultats issus de la 3ième conférence scientifique de l’UNCCD tenue en mars dernier à Cancun au Mexique et recommande que les travaux du CRIC soient améliorés afin d’en faire une tribune interactive.
Il a également recommandé que les décisions de la cop 12 tiennent compte des réalités de toutes les parties prenantes à la convention.
Pour le Délégué du PNUD, un effort concerté mondial s’impose pour mettre un terme à la désertification. C’est pourquoi, déclare-t-il, son Institution compte poursuivre son action dans les efforts locaux et mondiaux car il est possible voire indispensable d’inverser les tendances actuelles pour aider les pays à accéder à des financements qui faciliteront la remise en état des terres dégradées.
Pour le représentant du PNUE, le renforcement de la convention à l’échelle locale, sous régionale et régionale est essentielle pour une meilleure appropriation des objectifs fixés par la convention. C’est pourquoi son Institution s’implique à appuyer 109 pays qui rendent compte à la convention tout en respectant les plans cadres stratégiques de chacun.
Le porte-parole des organisations de la société civile a pointé du doigt les nouveaux modèles économiques qui exploitent et qui polluent l’environnement naturel. Ces modèles de développement non durables accélèrent la pauvreté, l’inégalité, les migrations, les perturbations civiques et ont des impacts dévastateurs sur les segments les plus vulnérables de la population notamment les femmes et les enfants. ‘’ Assurer la gouvernance de la terre et la prévention des conflits fonciers, est plus que jamais devenu un impératif, et la réhabilitation des terres plus que jamais crucial car les moyens de subsistance dépendent directement de la qualité et de la productivité des terres et de ses ressources’’.
Les OSCs soutiennent que la dégradation des terres est non seulement une menace pour les écosystèmes et la biodiversité, mais aussi une menace directe à la sécurité alimentaire, la durabilité, la pauvreté l’atténuation et à la stabilité politique.
C’est pourquoi les OSCs doivent se donner comme mission d’aider les populations à s’approprier de la convention, pour améliorer leur bien-être et leurs moyens de subsistance car 95% des denrées alimentaires proviennent de la terre.
Après ces différents propos, le Président de la COP 12 a procédé à la validation des agendas des sessions du CST, du CRIC avant de convier les participants à un cocktail dinatoire, une occasion de déguster des spécialités turques.
Cocktail dînatoire au hall du Congressum avec les participants venus des 4 coins du monde @AnkaraCOP12 @UNCCD pic.twitter.com/7anUVTeEql
— Chérif Fatoumata (@Fatiiche) October 12, 2015
A propos de la COP 12 :
La session de la COP 12 ouverte ce lundi 12 octobre à Ankara (Turquie) sera clôturée le 23 Octobre 2015 avec un segment de haut niveau les 20 et 21 Octobre au cours duquel les ministres et autres chefs de délégation tiendront des tables rondes et des séances plénières spéciales pour identifier des solutions possibles à la pénurie d’eau, la dégradation des terres et la désertification tout en maintenant les efforts pour atténuer les effets de la sécheresse et de la prévention de la dégradation des sols.
Deux organes subsidiaires de la COP, Comité de la science et de la technologie (CST) et le Comité pour l’examen de la mise en œuvre de la Convention (CRIC), tiendront également des sessions parallèles.
Le CST qui est la plate-forme scientifique pour les collaborations avec la convention tiendra sa 12ième session et le CRIC, chargé d’examiner les efforts de mise en œuvre de la convention, se réunira pour sa 14e session.
Pour plus d’informations :
https://www.unccdcop12.gov.tr/
Suivez toute l’actualité de la cop sur twitter :
@UNCCD
@UNCCDcso
@AnkaraCOP12
Visitez le blog de la CSO : https://civilsocietyatunccdcop12.wordpress.com/
Par Fatoumata CHERIF
Présidente de L’ONG Femmes, Pouvoir & Développement (FEDEP)
Guinée-Conakry
Email : ongfedep@gmail.com/ fatiiche@gmail.com
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